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J’ai voulu brosser mon recruteur dans le sens du poil

Mis à jour le : 9 août 2024

Peux-tu nous planter le décor de ton erreur ?

Mon doctorat en poche, je cherche un travail dans le milieu de la recherche, sans trop encore savoir si je souhaite travailler dans l’académique ou dans l’industrie. J’ai la chance d’avoir un parcours mixte et d’être à l’aise dans les deux milieux ; universitaire, moins aisé si on en croit les clichés, et grande école d’ingénieur, milieu social plus huppé. Cette ambivalence ne m’a jamais quittée : en dernière année d’École, je me suis spécialisée en faisant un DEA de physique théorique, à l’Université. Pendant ma thèse, j’ai travaillé pour un Établissement à caractère Public et Commercial à cheval entre la recherche universitaire et l’industriel. Je suis très heureuse d’avoir les deux facettes. C’est dans ce contexte je me rends à un entretien d’embauche dans un grand groupe industriel connu.

Pendant l’entretien, mon interlocuteur, chef d’équipe, me demande ce que j’ai préféré comme expérience. J’essaie de m’en tenir au fait que je n’ai pas nécessairement de préférence et que j’apprécie d’avoir les deux facettes à mon actif. Il insiste : “si vous deviez recommander une seule des formations à un collègue, que lui conseilleriez-vous ?” Plutôt que d’écouter mon cœur, ou dire que la réponse dépend des personnalités, je cherche la réponse que LUI souhaite entendre, pour le brosser dans le sens du poil. J’y vais à fond sur le cursus hyper compétitif prépa-grandes écoles, pour bien montrer que je suis une bonne bête à concours, comme on m’a appris pour ce milieu. On passe à autre chose…

À quel moment as-tu commencé à sentir que tu faisais erreur ?

Vraiment pas tout de suite. Je ne suis pas retenue sur le poste, mais je n’analyse pas trop pourquoi.

Je croise un peu plus tard un membre de cette équipe, qui était avec moi en école d’ingénieur. Il m’explique que je n’ai pas du tout plu à son chef. Parce que c’est le seul universitaire de l’équipe, qu’il en souffre et qu’il se sent comme un imposteur au milieu de tous ces ingénieurs !

J’avais tapé complètement à côté… Sur le coup, je me renfrogne en me disant simplement : “Tant pis pour ce frustré“.  Oui, on est très arrogant quand on est jeune !

Qu’as-tu appris de cette erreur ?

Un entretien d’embauche n’est pas fait pour séduire ou faire plaisir. Mais voir si on est en adéquation avec le poste. Autant pour moi que pour le futur chef. Si de toutes façons, on a des personnalités incompatibles, autant s’en rendre compte AVANT de s’embarquer dans une relation de travail qui va générer trop de souffrance.

Ces clivages Université / Grandes Écoles m’agacent au plus haut point et je ne veux donc pas y contribuer en répondant à une question que je trouve mal posée. Si j’avais été sincère, je lui aurais répondu cela. Dans le meilleur cas, j’aurais provoqué un écho chez lui. Au pire, il n’aurait pas été convaincu… Mais ça aurait toujours été mieux que de passer pour une pimbêche !

Ce souvenir me sert toujours à :

  • Désamorcer les rancunes entre profils d’étude différents (quand c’est possible !)
  • Moins tenter de faire plaisir aux autres et me contenter d’être moi (mais ça, c’est un travail de longue haleine).
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