La découverte des travaux de Frans de Waal et d’autres sur l’éthologie des grands singes m’ont amenée à m’intéresser aux parallèles entre éthologie et leadership.
Bien entendu, je n’ai pas la prétention d’apporter une contribution scientifique au sujet. En revanche, dans mon travail d’accompagnement des dirigeants, j’ai noté que l’éthologie pouvait constituer une source inépuisable de métaphores pour parler de leadership…. Et pour aborder l’épineuse question du pouvoir avec des dirigeants. Petit tour d’horizon amusé, illustré par des scènes de la vie politique française et internationale, plus ou moins récentes.
Celui qui devient mâle alpha est celui qui sait prodiguer suffisamment de justice et d’empathie pour maintenir la paix dans le groupe et se ménager les soutiens nécessaires à son accession et son maintien au pouvoir. Cela passe par :
Elle se manifeste par des attitudes d’attention et de compassion : s’intéresser aux petits des femelles en période de conquête du pouvoir, consoler les victimes et les malheureux une fois au pouvoir.
La plupart des mammifères ont une empathie émotionnelle, qui leur permet de ressentir les émotions de leur interlocuteur. Les chimpanzés et quelques autres animaux ont également une empathie cognitive, qui leur permet de comprendre ce que veut l’autre.
Gare à celui qui ne sait pas remercier ceux qui l’ont fait chef par quelques cadeaux et privilèges : ceux-là n’hésiteront pas à se coaliser avec un concurrent plus généreux.
Des expériences ont par ailleurs montré que des chimpanzés peuvent coopérer même sans être directement intéressés à la coopération, par souci de maintenir la relation à long terme. Une autre montre qu’à bénéfice égal pour lui, un chimpanzé choisira la solution qui procure un avantage comparable à son comparse plutôt que celle qui ne bénéficiera qu’à lui.
En cas de conflit, les interventions du mâle alpha se caractérisent par leur impartialité. Ses amitiés, habituellement si importantes, n’ont pas leur place ici. En général il prend la défense de la victime et s’assure du retour de la paix en offrant de la sécurité aux moins avantagés du groupe.
Après un conflit, si dur soit-il, les chimpanzés tendent la main à leur adversaire et se réconcilient dans de grandes embrassades avant que le groupe ne se sépare, afin de réparer la relation endommagée par le conflit et d’assurer le retour de la stabilité dans le groupe.
Être chef implique de nombreuses obligations : satisfaire ses partenaires, maintenir la paix dans le groupe et consoler les malheureux. C’est à ce prix que le leader stabilise son propre pouvoir. La manière dont le groupe traite ses anciens dirigeants découle directement de la manière dont il s’est comporté quand il était le chef. Un chef empathique et juste sera traité avec égards par le groupe une fois qu’il aura perdu son pouvoir. Un chef tyrannique aura généralement une fin beaucoup moins enviable.
La position de mâle alpha étant particulièrement enviable, le détenteur de cette position doit en permanence se méfier et s’assurer qu’aucune coalition ne se monte contre lui. Cela se traduit par un niveau de stress beaucoup plus élevé que celui des mâles de haut rang, et comparable à celui des individus de rang inférieur, qui subissent le plus d’avanies. Vous noterez qu’être challenger, question stress, c’est beaucoup plus cool.
Les bonobos forment une société égalitaire et empathique, où l’individu alpha est généralement une femelle. La manière dont elles conquièrent et exercent le pouvoir est encore un mystère, semble-t-il. Ce qu’on sait, c’est qu’elles forment des coalitions fondées sur l’amitié plutôt que sur les liens familiaux, et qu’elles sont capables de devenir très agressives quand il s’agit de se faire respecter.
Chez les chimpanzés, une femme ne peut pas avoir la place de chef du groupe, mais il y a une femelle alpha dans chaque groupe et elle y exerce un pouvoir qui peut être considérable.
N’en déplaise à certains, le rire n’est pas le propre de l’homme, le besoin de justice non plus. Donnez un salaire différent à deux capucins à qui vous avez donné le même travail à faire, comme l’ont tenté Frans de Waal et Sarah Brosnan à de multiples reprises avec des singes de plusieurs espèces, et vous ne serez pas déçu du résultat ! L’inéquité, dès qu’elle est connue devient intolérable et provoque des comportements de révolte.
Une expérience avec des chimpanzés a même montré que certains d’entre eux sont prêts à se priver de récompense jusqu’à ce que leur copain, qui a fait le même travail qu’eux, reçoive la même récompense !
La société des macaques est dictatoriale. Chez eux, « c’est le dominé qui sourit au dominant, jamais l’inverse. Un peu comme lorsque nous rions aux blagues du patron » commente Frans de Waal. C’est beaucoup moins vrai chez d’autres singes, notamment chez les chimpanzés qui peuvent sourire pour séduire ou rassurer.
Les émotions sont des phénomènes biologiques qui déclenchent des comportements. C’est aujourd’hui prouvé : tous les animaux en éprouvent, à des degrés divers, car ils en ont besoin pour survivre, au même titre que nous. Les grands singes, notamment les chimpanzés, sont même capables de les contrôler ou de les dissimuler, par ruse ou par embarras.
D’un point de vue évolutionniste, cette combinaison entre émotivité, sociabilité et appétit de pouvoir est commune à l’humain et aux primates. Cela rend le parallèle particulièrement fécond pour aborder différents aspects comportementaux du leadership, dans lesquels émotions, relations et rapports de pouvoir tiennent une place prépondérante, au-delà du contexte historique ou technique.
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