Avant d’utiliser le jeu de Go comme outil de coaching professionnel, j’ai d’abord joué pour le plaisir de jouer. Puis, dès le début de ma vie professionnelle, je l’ai utilisé comme outil pédagogique et de team-building.
En effet, la dimension ludique est présente depuis toujours dans mon approche de l’accompagnement professionnel. Le jeu, pourvu qu’il soit bien choisi par rapport aux objectifs poursuivis, permet de remettre sa vision du monde en question tout en s’amusant.
Puis, quand j’ai commencé à me former à l’approche systémique et stratégique, j’ai été frappée par les similitudes épistémologiques entre l’École de Palo Alto et le jeu de Go. Il n’en fallait pas beaucoup plus pour que ce jeu devienne un outil de coaching professionnel, au service de ma pratique du coaching systémique.
Dans cette étude de cas j’aborde 3 questions :
Depuis 30 ans, j’utilise le jeu de Go pour accompagner des leaders et des équipes, individuellement et collectivement. Je partage dans cette étude de cas une expérience qui m’a marquée. Par l’impact qu’elle a eu sur le management de ma cliente, mais aussi sur ma pratique de coaching de dirigeants et managers.
Camille est membre de l’équipe de direction d’une entreprise qui traverse de fortes turbulences. Son leadership dans la conduite de la stratégie de l’entreprise est clé. En effet, tous les membres du CODIR dépendent de ses décisions pour atteindre leurs objectifs opérationnels. Camille subit des pressions de toutes parts : de ses pairs, des fournisseurs, de son équipe qui n’en peut plus.
La voyant fragilisée, son DG lui suggère de se faire coacher pour devenir plus stratège de ses relations. Nous organisons une réunion tripartite durant laquelle nous co-construisons le dispositif de coaching. À cette occasion, le DG nous suggère de nous appuyer sur les principes du Jeu de Go qui l’ont beaucoup aidé dans son propre développement personnel et son management.
Le jeu de Go n’est pas une panacée universelle. En tant que coach certifiée, mon rôle dans la création du cadre du coaching est de clarifier la demande et d’identifier les préférences du coaché. Si la suggestion du DG d’utiliser le jeu de Go n’avait rencontré aucun écho, j’aurais écarté cet outil. Du reste, je l’ai utilisé à dose homéopathique avec Camille, qui n’éprouvait qu’un intérêt mitigé pour le jeu.
Pas très intéressée a priori d’apprendre à jouer au Go, Camille me décrit en détail :
Un coaching systémique l’aide à imaginer des comportements différents dans les relations les plus problématiques pour elle. Dans la boite à outils de l’approche systémique et stratégique, la visualisation des interactions est l’un des outils de coaching les plus puissants.
A la fin de chaque séance, nous revoyons les apprentissages du jour à travers des exercices de Go ciblés, ce qui renforce l’ancrage visuel des apports de la séance.
Camille me raconte comment un des managers du CODIR essaie régulièrement de la manipuler pour la forcer à prendre des décisions en sa faveur. Guidée par mon questionnement, elle me décrit des situations précises, ses réactions, ses états émotionnels, et les façons qu’a son collègue de parvenir à ses fins. Nous finissons toutes les deux par comprendre que la relation se déroule selon un schéma toujours identique.
L’objectif du coaching n’est pas encore atteint, mais Camille a fait un grand pas. Elle comprend comment fonctionne la relation, et le rôle qu’elle joue dans ce fonctionnement qui ne lui convient pas. Nous arrêtons là cette séance de coaching. Puis je fais jouer Camille à un jeu d’initiation qui permet de comprendre les règles de base du Go. Ce n’est pas qu’une question d’intuition : le jeu de Go est riche d’enseignements pour la gestion des conflits.
Après cette partie qui dure environ ¼ d’heure, je demande à Camille ce que cela lui inspire par rapport à sa vie professionnelle.
– Si je me précipite pour refuser à mon collègue ce qu’il me demande, il est obligé de se défendre et cela le renforce ! Donc si je te suis bien, je ne dois pas répondre immédiatement, pour avoir le temps d’organiser ma défense.
– Très pragmatique ! Alors, qu’est-ce que tu peux faire ou dire différemment ?
– Hmmm… Ne surtout pas lui laisser voir que sa demande me contrarie… Gagner du temps… Aller en parler aux personnes qui ont soi-disant donné leur accord… Et les laisser gérer ça entre eux par la suite !
– Magnifique ! Qu’est-ce qui pourrait te motiver pour essayer ça la prochaine fois ?
– C’est bon, je suis à fond, là.
Camille a désamorcé la relation conflictuelle avec son collègue du Comité de Direction. Au passage, elle reçoit les demandes de l’ensemble des collaborateurs avec un peu plus de recul, et prend son temps pour y répondre d’une manière qu’elle ne regrettera pas par la suite.
Bien qu’adorant son travail, Camille souffre de sa charge de travail. Elle a la tête dans le guidon, n’a plus le temps de faire avancer des dossiers importants. Elle a le sentiment de perdre son temps dans des tâches dans lesquelles elle ne trouve aucun épanouissement. Pourtant, travailler c’est sa vie : Camille n’éprouve pas le besoin de plus de temps pour sa vie personnelle… Mais elle aimerait pouvoir faire avancer ses dossiers autrement que le soir à 23h ou le dimanche.
Camille reconnaît que son problème n’est pas la surcharge en soi, mais plutôt la perte de contrôle sur ses priorités.
– Comment décrirais-tu ta gestion du temps ?
– Je suis au service de mes interlocuteurs. Ma porte est toujours ouverte. En télétravail, mon équipe peut me joindre à tout moment. Je peux enfin me concentrer une fois rentrée chez moi, quand les autres ne travaillent plus.
– Bref ce n’est pas toi qui gères ton temps et tes priorités, ce sont les autres !
– C’est mon rôle de manager…
Encore une fois, la séance de coaching se poursuit par une partie de Go pour faire émerger des réponses à la question « Comment être un bon manager sans perdre de vue les enjeux stratégiques de l’entreprise ? »
– Qu’est-ce que ça t’évoque par rapport à ta situation actuelle ?
– Si je te suis bien, en m’occupant de toutes mes pierres sans en sacrifier aucune, je perds la partie.
– C’est vrai. Et ?
– En répondant à toutes les sollicitations de mon équipe, je ne joue pas mon rôle stratégique pour l’entreprise. Mes équipes seront bien avancées que je sois une manager présente, si l’entreprise ne surmonte pas ses difficultés…
Ayant ainsi clarifié le sens et le périmètre de sa mission, Camille a mis en place pendant les heures de coaching restant à son programme de coaching :
En une quinzaine d’heures de coaching, Camille a utilisé la relation d’aide pour prendre du recul. Elle a effectué un travail sur soi en profondeur, largement au-delà de la demande de coaching initiale. Elle a revisité l’ensemble de ses relations avec son environnement professionnel. Aux dires de son DG, Camille a adopté une posture managériale plus en rapport avec le rôle de leader que son entreprise attend d’elle. Moins opérationnelle et plus stratégique.
Le cadre de coaching est resté le même que pour un coaching professionnel classique. Tripartite au début et à la fin, nombre de séances réduit. Ce qui a changé par rapport à un coaching de dirigeant classique, c’est l’utilisation du jeu, qui accentue certains moments forts du processus de coaching. La supervision était également différente. En effet, dans ce cas précis, où l’enjeu managérial et ma stratégie d’intervention étaient clairs, j’ai eu plus besoin d’aller chercher de l’inspiration chez un joueur de Go professionnel qu’auprès d’un superviseur coach ou thérapeute.
Jusqu’au travail de coaching réalisé avec Camille, j’avais toujours utilisé le Go en présentiel. J’ai pu observer qu’après quelques réglages techniques, il était parfaitement possible d’utiliser le jeu pour du coaching à distance. Il existe en effet des plateformes de jeu en ligne qui permettent de très bien coacher à distance.
Quelques semaines plus tard, Camille m’a envoyé ce petit mot pour partager en quoi le coaching avait contribué à sa connaissance de soi et à l’atteinte de ses objectifs professionnels.
« J’échangeais encore tout à l’heure avec un de mes collègues du CODIR. Je lui disais à quel point nos séances de coaching étaient bénéfiques à titre personnel et à quel point elles résonnaient (ou raisonnaient) avec notre quotidien. Je l’ai donc encouragé à vous contacter afin qu’il puisse lui aussi bénéficier d’un coaching avec vous : prise de recul, hauteur de vue, apaisement, sérénité et confiance en soi pour aborder toutes les situations de notre vie professionnelle… »
Je vous invite à découvrir mes offres autour du Jeu de Go, support de coaching stratégique en entreprise.
Vous pouvez aussi consulter la rubrique stratégie jeu de go du blog de Bridge the Gap Coaching, pour en apprendre davantage sur les apports du jeu de Go au management d’entreprise et au coaching de dirigeants.
Rencontrons-nous !